Cascadeur – Ghost Surfer (2014, Casablanca/ Mercury)

Cascadeur – Ghost Surfer (2014, Casablanca/ Mercury)

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Inespéré. C’est le premier adjectif qui vient à l’esprit en découvrant ce nouvel album de l’artiste français Cascadeur. D’une part, car il est attendu depuis maintenant trois ans et que The Human Octopus, son précédent essai transformé, était une merveille de pop aérienne, intimiste et ethérée. D’autre part, car Ghost Surfer surprend, dans le bon sens du terme. Et pour cause…

Le dépouillement du disque précédent ne laissait en rien présager le travail titanesque d’arrangements qui frappe dès les premiers accords de Casino: les cordes sont omniprésentes (et ce, tout au long de l’album), les samples et voix sont multipliées dans des harmonies toujours intelligentes et délicates. Mais avant tout, ce sont les styles ici traversés qui impressionnent: de la pop des années 80 (Ghost Surfer, titre éponyme) au psychédélisme et à la folk des années 70 (White Space, Standalone) en passant par l’electro (Road Movie I et II), le compositeur s’essaie ici à tous les genres en y apportant sa touche reconnaissable entre toutes. Son sens inné de la mélodie (qui en fait l’un des meilleurs artistes musicaux français actuels) pare chaque chanson d’atours veloutés et mélancoliques, lovant l’auditeur dans un confort délicat, la chaleur chassant le froid de quelques sons et amenant à l’esprit des paysages de glace infinis. Les rythmes changent, sont entraînants parfois pour mieux ralentir et apaiser avant de repartir de plus belle (Scarface). Il y a du John Lennon autant que du Nick Drake dans cette oeuvre, tant elle transite entre accords et multiplicité instrumentale (tous savamment organisés et mis en valeur). Le pari d’une telle production était risqué mais est facilement gagné.

Et toujours cette voix identifiable entre toutes; encore plus émouvante que sur The Human Octopus, elle trouve ses marques dans la sève musicale de ces 16 pièces d’exception en articulant les différents passages et les nombreuses montées orchestrales parsemées un peu partout sur l’album. The Crossing, Dark Passenger et Babylone, Babylon ???, triptyque structurel de Ghost Surfer, sont aussi émouvantes que des musiques de Michael Nyman, auquel on songe à de nombreuses reprises. Cascadeur laisse les tonalités suaves et aiguës de ses capacités vocales déborder du carcan de l’intime pour guider chacun dans ces méandres organiques et psychiques, quitte à les saturer pour encore mieux les mettre en avant (Dark Passenger). Fabuleuses, elles sont des lumières qui nous guident dans les galeries sans fin de ce coup de maître. Le piano, évidemment toujours présent, frôle le blues (Ladyday (Ladydouble)) avant de devenir base rock des poursuites effrénées de cordes, guitares et batterie. La distorsion côtoie la pureté des soli de scie musicale, les deux se mariant à l’envi, se cachant l’une à l’autre pour se répondre dans une union précieuse, voire sacrée (dans le sens le plus noble du terme). C’est peut-être ce qui résume le mieux cet opus: mariage du feu et de la glace, de l’exhibition et de l’intime, de l’explosion et du repli sur soi-même. Et lorsque la langue française se révèle dans un duo avec Christophe (Collector), la nostalgie émanant du chanteur invité touche au sublime en s’alliant aux délices sonores de la composition de l’hôte.

On ne s’attendait absolument pas à Ghost Surfer. Mais une chose est cependant certaine: tout comme The Human Octopus, il va nous (pour)suivre. Longtemps.

Raphaël DUPREZ

http://www.cascadeursound.com/

‘Unhoped for’ is the first adjective which comes to mind while discovering the new album from French artist Cascadeur. First, because it has been expected for now three years and that his previous work, The Human Octopus, was a masterpiece of aerial, intimate and ethereal pop music. Moreover, simply because Ghost Surfer is nothing less than a wonderful surprise. Here are the reasons why…

After listening to the musician’s first LP, no one could have predicted how titanic his work on arrangings would be so fascinating, from the first melodies in Casino: strings are everywhere (and throughout the entire album), samples and vocals plenty, harmonious and delicate. Though, mostly, one is impressed by all the genres mixed here: 80’s pop (Ghost Surfer), 70’s psychedelic and folk (White Space, Standalone) and electro (Road Movie I and II) music. Cascadeur is constantly experimenting them while keeping his famous and amazing trademark. His inner sense of melody (which makes him one of the best actual French musicians) gives a velvet and melancholy tone to each song and settles each listener in a delicate and warm comfort, heat then chasing the coldness of a few sounds then bringing the image of infinite icy landscapes to one’s mind. Drums regularly change, and sometimes accelerate to immediatly better slow down and appease before going on again and again (Scarface). Tunes sound like John Lennon’s or Nick Drake’s, so much they include complexity and admirably mixed and emphasized tones. Producing an album in such a way was risky, but Cascadeur perfectly succeeds here.

And, of course, the singer’s voice is still recognizable; more moving than his first album, it  wonderfully goes its own way through the musical blood veins of these 16 exceptional songs by articulating various delicate and orchestral moments which can be discovered while hearing the album, little by little. The Crossing, Dark Passenger and Babylon, Babylone??? , being the core of Ghost Surfer, are as moving as Michael Nyman’s soundtracks, so much they remind one of this particular composer. Cascadeur‘s soft and acute vocal tonalities and abilities travel above intimacy to guide each one in these organic and psychic tunnels, even when they are close to saturation to better value them (Dark Passenger). They are like fabulous lights which guide us in the endless galleries of this work of art. An ominous piano first sounds blues (Ladyday (Ladydouble)) then rock in a pure race between strings, guitars and drums. Distortion tends to a fight with musical saw solos, both emulously united, as they hide one another before shining together into the light. It is perhaps what best stands for this LP: an union between fire and ice, exhibition and intimacy, explosion and introspection. And when the French vocals are performed thanks to a duet with French singer Christophe (Collector), the breathtaking nostalgia of his well-known songs is overvalued by Cascadeur’s talent in composing and arranging.

One did not expect an album as perfect as Ghost Surfer. But for sure, like The Human Octopus, it will haunt us. For a long time.

Raphaël DUPREZ

http://www.cascadeursound.com/

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