Silo – Work (2014, Novennial Paralysis)

Silo – Work (2014, Novennial Paralysis)

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Qu’est-il arrivé à Silo? Quatorze ans sans nouvelle du trio danois, pratiquement du jour au lendemain; puis ce retour inattendu, pratiquement passé sous silence, avec un nouvel album incroyablement différent de leurs opus précédents. D’orphelin, l’auditeur devient témoin d’un virage artistique à 180 degrés, même si certaines terres arides significatives du groupe demeurent toujours présentes et nous ramènent vers des paysages sonores rassurants car déjà connus. Mais il semble que, tandis que les vies personnelles des membres de l’entité se sont posées, leur musique, elle, a pris littéralement feu. Work est un sommet de saturations violentes, de boucles puissantes et de sueur. Pas du tout ce qui était attendu; non, encore mieux.

Les guitares arrachent la peau, découpent à la scie des semblants de mélodies, des thèmes plus bruitistes qu’harmonieux, réveillant la lave sur laquelle, pourtant, une vie va prendre forme. Etirant leurs atmosphères jusqu’au point de rupture (Generals, Work (Out)), Silo tranchent dans le muscle à vif, versant le sel directement sur les plaies ouvertes (Filaments, A Hedge Is A Lance) avant de poser des baumes cicatrisants et de recommencer à tailler les veines, à souffrir pour mieux exorciser les démons défigurant le corps supplicié ici exposé aux yeux de tous. Quelques pauses comme autant de reprises de souffle (Untitled 1 et 2) ne laissent pourtant pas le rituel s’achever si facilement. Au contraire, les figures malsaines invoquées sont inconnues et hors de portée mais trouvent leur place dans l’âme meurtrie de Work: du rap (Cabinn Fever) au trip-hop façon Tricky (Power Points) en passant par des élans presque funk (Stationary) ou electro (Mechanics), les Danois ingèrent, digèrent puis jettent à nos visages des prières autant salvatrices que maléfiques et tentatrices. Exsangues, on trouve enfin un semblant de rédemption dans l’ultime impulsion électrique de The Inexorable Sadness Of Pencils, témoin encore brûlant du séisme sonore qui vient de s’accomplir et nous a transformés à jamais.

Work respire l’uranium et l’industrie. Toujours à la limite de l’explosion et de ses conséquences, le disque laisse pourtant, au fil des écoutes, des victimes collatérales qui n’en demandaient pas tant, mais qui n’auront pas eu le temps de comprendre ce qui leur arrivait. Car ce chef-d’oeuvre insidieux et immersif, sol dévasté mais irrémédiablement chaud, immobilise les membres et les comprime dans un mélange de soufre et de brumes artificielles. Alors que l’on croit marcher sur la lune, il n’en est pourtant rien: c’est bien sur Terre que l’on se trouve encore, mais au milieu des décombres, là où toute vie naturelle reste à jamais figée. Désertiques et craquelés, les paysages qui nous entourent gardent cependant ce précieux sentiment d’une présence indéfinissable, épiant chacun de nos mouvements, sans que l’on sache réellement si elle est prête à nous attaquer ou, au contraire, à sortir le drapeau blanc. Silo jouent avec nos nerfs tout au long des 11 titres du LP, nous renversent et nous paralysent afin de nous permettre d’assister au réveil furieux d’éléments émotionnellement fascinants que physiquement dévastateurs. Rarement un disque aura eu un tel impact sur l’esprit et le cerveau, un tel pouvoir d’absorption des fonctions motrices. Un tour de montagnes russes avant le déraillement.

Work est inattendu et inespéré; et, comme ils nous a manqués pendant plus d’une décennie, il est certain que l’art de Silo va nous hanter jusqu’à leur prochain album.

Raphaël DUPREZ

http://silomusic.net/

https://www.facebook.com/silocph

 

What happened to Silo? Fourteen long years have passed since their latest album to date and, suddenly, no news from the Danish trio; then, they are unexpectedly back on track, almost in silence, with a brand new and really different record. From being orphans, we then become witnesses of a radical artistic change, even if some of the dry lands characterizing the band’s fascinating sounds remain at reach and bring us back to comforting and well-known memories. Though, as all members seem to have found peace in their own personal lives, their music has been set to flames. Work is a summit of violent distortion, powerful and sweaty loops. It is not what we have all been waiting for; on the contrary, it is much more better.

Guitars are sharp and cut into seemingly melody parts, noisy though harmony themes, like a saw, letting lava erupt where a new life is about to be born. Stretching atmospheres to the breaking point (Generals, Work (Out)), Silo are ripping muscles and pouring salt into our opened wounds (Filaments, A Hedge Is A Lance) before putting healing balms, then starting again, tearing up our veins and preparing us for suffering, in order to exorcise all existing demons that are disfiguring our supplicant and foreseeable bodies. Allowing a few times off to breathe a little (Untitled 1 and 2), we are obviously back to this everlasting ritual. Thus, devilish figures that glow in the dark corners of the LP are unknown but find a place to secretly stay in it and wait: rap tones (Cabinn Fever), Tricky-like trip-hop moods (Power Points), funk moments (Stationary) or electro waves (Mechanics) are invoked by the band, assimilated then spat on our faces like saving though maleficent and tempting prayers. As we remain here, bloodless, we finally find redemption in the electrical impulses of The Inexorable Sadness Of Pencils, testifying for the astonishing and dehydrating earthquake we have gone through and that has changed us forever.

Work smells like uranium and industry. Always close to explosion and its consequences, the record is leaving collateral damages behind, as we listen to it again and again, even if victims have not been suffering; because this insidious and immersive masterpiece is like a devastated but hot soil, paralyzing our arms and legs and compressing them in a mixture of sulfur and artificial mist. As we think we are walking on the surface of the moon, we are abruptly conscious of the ground we are marching onto; Earth, or more precisely, what is left of it. We go among rubble, where all natural sources stand still. Nevertheless, such deserted and rough landscapes surrounding us are reflecting the terryfing sensation that someone, or something, is watching us and all our movements, as we do not know if it will rush on us or try to communicate and make peace. Silo are playing with our nervous systems all along the 11 songs of the LP, pulling us apart as we can only stand still and watch furious, emotionally fascinating and physically mind-blowing elements passing before our eyes. Such a record is rare nowadays, provoking an incredible shock to the brain and mind, absorbing all human engines. It is a ride on a roller coaster, before the train goes off the rails.

Work is as unexpected as amazingly intriguing. And, as we have all missed Silo in the past few years, no doubt that we will be doing the same while waiting for a new record.

Raphaël DUPREZ

http://silomusic.net/

https://www.facebook.com/silocph

 

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